Interview de Jean-Michel Ferragatti, le scénariste de « Centaur Chronicles tome 1 »

Couverture du comics Centaur Chronicles tome 1Centaur Chronicles, c’est le Watchmen des super-héros de l’Âge d’or des comics. Ou quand trois artistes français ressuscitent avec brio les justiciers oubliés !

 

Fin des années 50, dans un univers qui ressemble beaucoup au notre. Un monde où les super-héros se sont retirés pour prendre un repos bien mérité. Qui évidemment ne va pas durer longtemps : une explosion détruit l’un des derniers étages de l’Empire State Building, où vivait The Magician From Mars, un ancien justicier. Amazing Man et The Eye (un œil spectral) se rendent sur place pour enquêter sur la mort de leur ami. Ils découvrent rapidement des indices qui leur suggèrent qu’un ennemi est de retour. L’heure est venue de réunir les autres super-héros pour s’opposer à leur nemesis surgit du passé.

 

 

Centaur Publications

À partir de 1936, Centaur Publications est l’une des premières maisons d’édition de comic books. C’est aussi une des plus importantes : elle développe un genre populaire (les histoires de super-héros) et fait appel à des artistes comme par exemple Bill Everett (le créateur de Namor), Paul Gustavson (le créateur de The Arrow, le 1e super-héros archer, lointain ancêtre du Arrow de la série tv homoyme) ou Al Plastino. Mais en 1942, Centaur Publications connaît de graves problèmes de distribution, et disparaît du marché. Si ce n’est pas la mort du genre super-héroïque, les personnages développés par Centaur Publications disparaissent des rayonnages.

 

Extrait du comics Centaur Chronicles tome 1
crédit : Bill Everett (Centaur Publications)

 

La double renaissance des héros Centaur

L’idée géniale de Jean-Michel Ferragatti consiste à faire revivre ces personnages de deux manières. La première consiste à proposer de nouvelles aventures plus modernes. Pour cela, il fait appel au dessinateur Patrice « Marti » Martinez, déjà remarqué sur son très recommandable Hoplitéa. Cet album participait déjà à sa manière à ranimer l’étincelle du vintage, d’une certaine narration oubliée. La seconde façon de faire revivre ces personnages Centaur, c’était tout simplement de proposer les épisodes originaux. Reed Man (Fantask Force) s’est habilement chargé de la restauration de ces vieilles planches qui certes accusent leur âge mais au charme indéniable.

 

Extrait de Centaur Chronicles tome 1
crédit : Marty (FG Prod)

 

Who watches the Centaur Men ?

Restait donc à trouver l’angle d’attaque, l’idée pour animer cette renaissance. Il y a dans Centaur Chronicles des passages qui rappellent énormément Watchmen. Mais l’histoire fait penser à une autre œuvre d’Alan Moore. Car si Watchmen peut se lire comme une charge contre le genre super-héroïque, Supreme est lui une véritable déclaration d’amour. Watchmen, Supreme : avouez qu’on a connu pire références. Et Jean-Michel Ferragatti se montre très fort au petit jeu des références. Il n’hésite pas à utiliser avec beaucoup d’ironie l’un des pires ennemis des comics. Ou quand la fiction rejoint la réalité. Ça tombe bien, l’intrigue de Jean-Michel Ferragatti brouille la frontière entre les deux. Pour notre plus grand bonheur.

 

 

Dernière ligne droite pour le financement du tome 2

Cette très belle réussite ne peut donc se limiter qu’à un seul tome. Et justement, les auteurs ont lancé une campagne de financement sur internet pour publier le tome 2 de Centaur Chronicles. Je vous invite donc à vous rendre sur la page Ullule dédiée au projet. Le financement se termine dans quelques heures. Découvrez en vidéo la présentation du crowdfuning de ce tome 2 :

 

 

Stéphane Le Troëdec

 

Jean-Michel Ferragatti (scénariste), Patrice Martinez, Reed Man (dessinateur), Centaur Chronicles, tome 1, FG Prod, 96 pages, 19,90 euros


Entretien exclusif avec Jean-Michel Ferragatti, scénariste de Centaur Chronicles

Jean-Michel Ferragatti Centaur Chronicles tome 1

 

Jean-Michel Ferragatti est l’auteur d’articles sur l’histoire des super-héros américains publiés dans des fanzines français comme Le Rocambole, Pimpf et Oméga (avec notamment un dossier spécial Centaur). Il contribue aussi à l’iconographie du magazine américain Alter Ego édité par Roy Thomas.

 

Tu n’en es pas à ton coup d’essai, puisque tu es déjà l’auteur de L’Histoire des Super-Héros aux éditions Neofélis. À quand remonte cette passion pour les super-héros vintage ?

Ma passion des super-héros méconnus du golden age remonte à la fin des années 90 lorsque mon ami Claude Eloy de la défunte librairie « Dans la gueule du loup » m’a fait découvrir des vieilles publications françaises avec des super-héros du golden age américain dans des vieux illustrés comme Hurrah !, L’Aventureux, etc.

 

Centaur Chronicles, entretien avec Jean-Michel Ferragatti
crédit : Marty (FG Prod)

 

Comment t’es venu l’idée de réutiliser des personnages tombés dans le domaine public ?

En me documentant sur les personnages méconnus du golden age pour L’Histoire des super-héros, je me suis rendu compte qu’il n’y avait pas d’étude exhaustive sur les personnages Centaur (l’étude dans Oméga a d’ailleurs été la première à ma connaissance, précédent même celle publiée après dans Alter Ego). Du coup, j’ai relu tous les épisodes de Centaur Comics et j’ai trouvé un point commun à ces personnages. Je me suis donc dit qu’il y avait une idée à exploiter. Et comme les personnages sont libres de droits, nous pouvions les réutiliser.

 

Dans Centaur Chronicles, j’ai cru déceler des références à deux oeuvres d’Alan Moore, Watchmen et Supreme. Est-ce que ce sont tes livres de chevet ? Et si ce n’est pas le cas, quels sont tes titres de référence sur ce projet ?

Il y a en effet plusieurs références consciente et inconsciente dans Centaur Chronicles. Inconsciemment il y a en effet du Watchmen dans Centaur Chronicles. Plus consciemment il y a aussi du Judgement Day (spin-off du Supreme d’Alan Moore) et aussi du Rising Star de Straczynski. Et bien sur des séries comme The Invaders, All Star Squadron, Alter Ego (le tout de mon ami Roy Thomas) ou Terra Obscurea d’Erik Larsen.

Centaur Chronicles, entretien avec Jean-Michel Ferragatti
crédit : Marty (FG Prod)

 

Centaur Chronicles est un projet ambitieux tant sur la narration que sur la forme, avec à la fois des épisodes de l’âge d’or des comics et d’autres plus modernes. Quelles difficultés avez-vous rencontré, toi et tes « complices » ?

Et bien en fait, mis à part deux faux départs avec Reed Man et Fred Griveau (mais qui restent tous les deux impliqués sur le projet à divers niveaux), il y a le défi de trouver du matériel originel quasi totalement cohérent avec le récit moderne et avec une qualité suffisante pour le restaurer. Par exemple, dans le volume 2, nous avons dû renoncer à un épisode de The Shark et dans le volume 3 nous avons eu beaucoup de difficulté avec un épisode d’Amazing Man. Sinon, c’est plutôt l’inverse. Au fur et à mesure du développement du projet nous avons eu beaucoup de bonnes surprises. Des idées qui collaient parfaitement avec des développements de personnages ou des épisodes originaux. La destinée ou la sérendipité ?

 

Le financement participatif du tome 2 se termine aujourd’hui sur Ullule. Peux-tu nous en dire plus sur l’intrigue ?

Compliqué d’en parler sans rien spoiler. Néanmoins, dans le volume 1 intitulé Renaissance nous assistons au retour des personnages Centaur. Après cette redécouverte, ou découverte, le volume 2 va nous en apprendre plus sur les origines des personnages. Nous allons développer le lien commun des personnages, leurs origines spécifiques (notamment celles de Fantom of the Fair, Masked Marvel et surtout The Eye). L’aspect uchronique sera également accentué et l’intrigue progressera au niveau temporel. Et comme pour le premier volume, la dernière image sera un réel choc pour les lecteurs.

 

Propos recueillis par Stéphane Le Troëdec

 

 

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