Thunder tome 1 : le thriller young adult par David Khara

Un jeune londonien comme les autres…

Ilya Volochin est le fils d’un magnat russe de l’industrie, mort dans l’explosion de son usine. Recueilli par sa grand-mère — qu’il ne voit jamais, —, il emménage dans un manoir et commence sa nouvelle vie dans un lycée pour gens exceptionnel, à Londres. Mais son entrée dans Excelsior ne se passe pas comme il le souhaitait : au lieu de se glisser inaperçu dans sa nouvelle vie, une bagarre d’entrée révèle à tous sa maîtrise des arts martiaux. Il rencontre vite Angela, et tombe sous son charme. Deux adolescents un peu en marge qui se sont bien trouvés !

La vie d’Ilya se complique encore quand il est mis en retenue avec Angela, et se retrouve coincé avec un génie de l’informatique, une fille aux sens surdéveloppés, une gymnaste d’une rare souplesse et une boxeuse. Mais un événement étrange va faire de ces gamins un véritable groupe, soudé, et leur offrir la possibilité d’entrer dans une histoire dont la portée les dépasse encore largement dans ce premier tome. Mais l’auteur est connu pour mêler l’histoire et les dossiers les plus glauques à ses polars, c’est pourquoi l’implication du régime nazi et du MI6 ne surprendra pas, mais comment il l’utilise, oui ! 

— Différents ? Tous les adolescents se sentent différents. Tous les adolescents s’interrogent un jour ou l’autre sur leur place réelle dans ce monde.

— Je parlais plutôt de ce qu’on sait faire, s’excusa presque Pad.

— Pour l’instant, vous n’êtes que des jeunes gens doués, et vous êtes loin d’être les seuls. Séparément, vous êtes différents, si vous restez soudés, loyaux, alors au sein de Thunder vous deviendrez bien plus que différents,. Vous deviendrez… exceptionnels !

Thunder est un roman qui se dévore d’un trait, sans perdre haleine. Des personnages attachants et une histoire incroyable font de ce premier tome, centré sur la présentation des personnages, de l’intrigue générale et la formation du groupe, la promesse d’une incroyable série !

ENTRETIEN

Tardivement entré dans la carrière d’écrivain, David S. Khara a rencontré un large public grâce à sa série des Projets (Le Projet Morgenstern,  Le Projet Bleiberg, Le Projet Shiro). Membre de la Ligue de l’imaginaire (avec entre autres Maxime Chattam, Henri Loebenbruck, Bernard Werber et Patrick Bauwen), entre dans le monde des thriller-ado en publiant Thunder

D’où vous vient l’envie, après plusieurs romans à succès très adultes, d’écrire une série pour la jeunesse ? 

J’avais l’envie d’écrire pour les ados depuis mes débuts. D’ailleurs, même dans mes romans dits adultes, j’utilisais les codes du divertissement pour amener des éléments de connaissance historiques et scientifiques. J’ai constaté au fil du temps que de très nombreux ados lisaient mes romans et la transition semblait toute tracée. 

Justement, quels sont pour vous les codes du divertissement ?

Je ne me permets évidemment pas de définir des codes génériques. J’écris des romans que j’aimerais lire, donc je me bornerai à parler de ce qui fonctionne sur moi. Je travaille sur des chapitres courts, très rythmés (j’espère). L’idée étant de toujours donner envie de savoir ce qui va se passer après. Beaucoup d’action, des combats, un peu de pyrotechnie, pas mal de voyage à travers le monde. L’humour, le second degré, la dérision sont également très présents dans mes romans. Autant que faire se peut, j’essaye de faire en sorte que l’on referme mes livres avec le sourire. Et puis, évidemment, il y a les personnages qui forment l’élément central de la structure. La figure du héros me hante depuis d’Artagnan !

D’Artagnan ce n’est pas Pardaillan, il lui manque l’absolu de l’héroïsme immédiat. C’est un héros qui le devient au fil de l’histoire.

C’est tout à fait l’idée. Thunder, on suit la genèse des héros au fil de leur construction en tant qu’individu. C’est autant une série d’aventure qu’une chronique de l’évolution des adolescents. Ils connaîtront des fortunes diverses, des changements radicaux et parfois plus subtils. C’est même là le véritable enjeu de Thunder.

Comment avez-vous appréhendé ce changement de lectorat ? Quelle méthode d’écriture ?

L’écriture a été relativement simple, sans réelles contraintes liées à l’âge des lecteurs. J’ai tenté de créer une aventure lisible de 9 à 99 ans, ce qui induit deux choses : je ne prends pas les jeunes pour des idiots et je mets en place une intrigue globale assez complexe sur fond de faits historiques. La littérature jeunesse aujourd’hui ne s’interdit rien, et les séries télés pour ados ne se gênent pas non plus. Il n’était pas question pour moi de m’adresser à eux en deçà de leurs référents. J’avais également envie de transmettre des valeurs à travers le roman, des valeurs universelles auxquelles je crois dur comme fer, telles que la solidarité, le courage, l’abnégation. Et puis, derrière, une question qui me suit à travers tout mes écrits : la capacité de l’humain à se transcender, à devenir meilleur.

Vous avez des ados dans votre entourage ? Ont-ils été vos bêta-lecteurs ?

Oui aux deux questions. Je guettais leurs impressions avec plus d’inquiétude que cela n’a été le cas avec mes béta-lecteurs adultes, car ils n’allaient de toute façon pas me faire de cadeau. Et puis, ils sont au cœur du sujet et des personnages. Les retours ont été au-delà de mes espérances. Certains me citaient de mémoire des dialogues entiers, s’identifiaient à tel ou tel personnage. Un court-métrage a même été réalisé par des enfants sous l’égide d’éducateurs d’un centre de loisirs et d’une médiathèque proche de mon domicile.

Et je n’ai même pas eu à prendre en otage leurs téléphones portables pour obtenir leur attention ! 

Vous racontez l’histoire d’un groupe d’adolescents un peu particulier. Mais  en quoi diffèrent-ils des Club des Cinq ?

Voilà une question difficile car je n’ai jamais ouvert un Club des Cinq ! Je ne peux qu’imaginer une différence basique : l’époque et ses enjeux. Les personnages présentés dans Thunder correspondent plus à des standards actuels et sont nourris pas mes références qui, en matière de groupe d’adolescents, se situent plutôt du côté des X-Men et notamment dans la version née au milieu des années 1970. Et puis, dans une version plus classique et littéraire, je lorgne aussi du côté des trois mousquetaires, groupe emblématique s’il en est pour ma génération.

Pour revenir aux héros de Thunder, ils sont cinq pour l’instant, mais le groupe évoluera avec des arrivées et des départs. Par ailleurs, en parallèle de leurs aventures, leurs personnalités vont évoluer, se façonner, comme c’est le cas à l’âge qui est le leur. Derrière l’aventure, Thunder va raconter l’histoire d’individus en devenir.

Vous avez lu les confrères du polar ado avant de vous lancer, ceux qui ont comme vous une bande ?

Je m’en excuse par avance, mais la réponse est non. J’ai tenu à partir vierge de toute référence autre que celles liées à ma propre histoire. Par exemple, Ilya est un clin d’œil direct à la série télé Des agents très spéciaux (Man from Uncle). De la même manière, on retrouve de nombreux clins d’œil au fil du roman, comme les trois scientifiques anglais qui portent tous les noms de membres des Monthy Python, d’où un côté un peu Brazil de la période passée.
Mais la Brigade des Fous est sur la liste d’attente et sera lu cet été, une fois que j’aurai terminé d’installer le ton de Thunder.

Quelle est la part de vérité dans la trame historique qui fonde votre histoire, ces tests sur des enfants et les liens entre Nazis et MI6 ?

Aucune à priori, sauf que…

Vous savez bien que les savants nazis ont été « récupérés » par les deux côtés et ont travaillé librement sans être jamais inquiété de leur passé !

Je m’explique. Les expériences décrites dans Thunder n’ont, je l’espère, pas existé. Ce qui est réel cependant, c’est la volonté frénétique des différents gouvernements et services secrets alliés de mettre la main sur les découvertes scientifiques et technologiques, notamment allemandes et japonaises. J’en traite dans la trilogie des Projets, et cet aspect forme le lien entre les deux séries. Werner Von Braun, inventeur des V2, a joué un rôle capital dans la conquête spatial américaine. Shiro Ishii, triste responsable de l’unité 731, a vendu les résultats de ces expériences sur l’être humain aux services secrets américains et aurait collaboré avec l’armée pour le développement d’armes chimiques. Russes et anglais ne sont pas en reste. Cette approche commune entre Le Projet Bleiberg, Le Projet Shiro et Le Projet Morgenstern me permet également d’installer le héros de cette trilogie comme figure tutélaire planant au-dessus de Thunder et donc de créer un univers partagé à la manière d’un Stan Lee avec les héros de la Marvel.

Encore la Marvel ? Stan Lee est votre saint patron ? Sa façon de mélanger le réel et l’imaginaire comme dans un bon roman historique a forgé votre envie d’écrire ?

Et oui, encore la Marvel ! En fait, mon saint patron est Saint Jude. Les causes perdues me passionnent… 

Plus sérieusement, Stan Lee, et les scénaristes de la Marvel, sont passés les maîtres absolus des univers partagés. Outre un vrai regard social, surtout dans les années 60-70 avec des épisodes censurés car traitant d’alcoolisme et de drogue, ils ont su mêler les personnages et les séries. Ces passerelles me plaisaient en tant que lecteur, et j’entends bien les pratiquer en tant qu’auteur. Quant au mélange entre le réel et l’imaginaire, il s’inscrit au cœur même de mon écriture et de mes scénarios. Ne plus pouvoir distinguer le vrai du faux me plaît. Bien souvent, ce que je raconte de plus incroyable est ce qu’il y a de plus vrai. Enfin, si Stan Lee a nourri mon imaginaire, mon envie d’écrire est née d’une autre BD, intitulée La Quête de l’Oiseau du Temps, scénarisée par Serge le Tendre et dessinée par Régis Loisel. Sur un fond fantasy, ils explorent l’âme humaine, ses motivations, ses aspirations, ses fêlures. C’est cette volonté allégorique qui me guide encore aujourd’hui.

C’est pour cela que votre Thunder n’est pas à mettre dans une seule case et que le fantastique est présent, pour travailler comme vous le dîtes sur des univers partagés ?

J’aime le mélange des genres et refuse de m’enfermer dans un seul. En fait je vais même plus loin. Je ne reconnais pas les genres, les segmentations ne signifient rien à mes yeux. Star Wars est tout sauf une histoire de vaisseaux spatiaux, et le Seigneur des Anneaux ne se cantonne pas à la destruction d’une bague.

Par contre, pour ce qui est de Thunder, le côté fantastique est loin d’être aussi évident que cela. Certains développements pourraient, en la matière, vous surprendre…

Propos recueillis par Loïc Di Stefano

David Khara, Thunder, tome 1, ActuSF, « Label Naos », mai 2020, 229 pages, 16,90 eur

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