Catherine II, la vie d’une femme de pouvoir

Une spécialiste de la Russie moderne

Directrice de recherches au CNRS, Francine-Dominique Liechtenhan a déjà publié deux biographies importantes, celles d’Élisabeth Ire de Russie (Fayard, 2007) et de Pierre le Grand (Tallandier, 2015). À travers ces deux personnages se jouaient l’entrée tumultueuse de la Russie dans la modernité et aussi dans le concert européen. Et redécouvrir la vie de Catherine II permet de voir comment ce processus a été mené à son terme.

Une princesse allemande

Née en 1729, la future Catherine II était une princesse allemande pétrie de culture française. Elle fut amenée, un peu contre son gré, à épouser le futur Pierre III, neveu de la tsarine Elisabeth Ie. Convertie à l’orthodoxie, Catherine apprend la langue et les usages russes et aussi à survivre à la cour des Romanov. Elle doit coexister avec un mari fantasque, qu’elle n’aime pas et à qui elle donne un héritier, Paul, dont on ne saura jamais avec certitude qui est le père. En tout cas, elle réussit son coup d’état, écarte son mari et se met à gouverner un empire avec l’aide de l’aristocratie dont sont issus ses amants (Orlov puis Potemkine).

Une autocrate réformatrice ?

Catherine II fait partie des despotes éclairés célébrés par les Lumières. De fait, elle fait beaucoup pour la Russie en fondant des villes, des écoles, des hôpitaux, en développant l’université. Elle contre elle cette aristocratie qui l’a soutenue contre Pierre III et qu’elle doit donc ménager tout autant que l’église orthodoxe. Pour autant, Catherine II ne renonce pas à ses prérogatives et gouverne en autocrate, se référant à l’œuvre et à la figure de Pierre le Grand. Si elle rédige des projets de constitution inspirés des lumières, elle ne change pas les fondements de l’autocratie russe et n’abolit pas le servage. L’a-t-elle un jour souhaité ?

La puissance russe

On comprend avec ce livre que sa grande réussite est d’avoir réussi à faire de la Russie un acteur incontournable de la scène européenne : elle contribue à l’élimination de la république de Pologne, dont le territoire est partagé avec la Prusse et l’Autriche, et arrache la Crimée et les rives de la mer noire à l’empire Ottoman. Grande publiciste, elle réussit aussi à vendre son œuvre auprès des philosophes français, comme Voltaire, qui chantent ses mérites. Elle meurt au moment où les idées de la Révolution française commencent à infuser en Russie malgré la Révolution, laissant à ses héritiers Paul Ier et surtout le futur Alexandre Ier des défis importants à relever.

Catherine II par Francine-Dominique Liechtenhan est une très bonne biographie.  

Sylvain Bonnet

Francine-Dominique Liechtenhan, Catherine II, mars 2021, Perrin, 500 pages, 24 eur

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