Autopsie pastorale, dans la chambre froide avec Frasse Mikardsson

La médecine légale enfin à l’honneur

Frasse Mikardsson cumule tout ce qui me passionne: La Suède et la médecine légale. Avec ces deux atouts, je ne pouvais pas détourner le regard de ce roman qui m’a tout de suite interpellée. 

J’ai découvert cet auteur tout à fait par hasard, mais mon instinct m’a commandé de foncer, et je ne me suis pas trompée! Ce roman est juste une pépite, dans un genre tout nouveau, car depuis que je sillonne les thrillers et autres romans noirs, jamais encore la médecine légale n’avait été au cœur de l’enquête policière. Souvent reléguée à un rôle secondaire (dû probablement à notre système judiciaire français), il a fallu attendre le concours d’un auteur franco-suédois pour nous apporter cet acte médical d’enquête primordial sur un plateau!

Scalpel, je vous prie

Car nous parlons avant tout d’une autopsie, oui, d’accord, mais quelle est cette enquête qui va nous torturer les méninges au fil des pages? 

Lillemor Bengtsdotter, pasteure à la retraite, est découverte sans vie dans le presbytère où elle vivait, à Sigtuna, Suède. Les constatations rapidement expédiées par les agents de police sur place concluent à un simple décès à domicile, la routine, quoi. Des éléments troublants vont cependant semer le doute dans l’esprit de l’étudiant en médecine générale chargé de constater le décès de la pauvre femme. Une bataille va se livrer afin que soit diligentées des investigations pour recherche des causes de la mort de la femme de foi. De surprises en rebondissements, le lecteur va suivre chaque acte et chaque piste en pensant mettre la main sur la clef du problème, en vain.  

The swedish dream

Pile au moment où je commence à chercher comment intégrer les forces de police suédoises et vendre ma maison, je me plonge dans cette « autopsie sacrée »; Frasse Mikardsson nous immerge progressivement au sein de cette société longtemps méconnue, nous explique quelques us et coutumes et permet aux néophytes du pays scandinave de mieux comprendre le contexte professionnel et relationnel dans lequel le lecteur va évoluer.

En effet, la culture suédoise est très particulière, en ce sens que les mentalités et les conceptions sont très différentes des nôtres. En toute simplicité et de façon légère, on pénètre dans le quotidien de ces enquêteurs d’un autre genre. On en apprend plus sur les procédures policières, le rôle de chacun, et les confusions à ne pas faire entre les systèmes procéduraux policiers français et suédois. Le tout sans être perdu. Je chope même mon manteau avec ma capuche en moumoute pour ne pas en perdre une miette.

Comme un meuble IKEA ? (Pardon, il fallait que je la fasse)

Tout en finissant mon Kanelbullar en résistant à la furieuse envie de me lécher les doigts, je repense aux personnages de ce roman. Ils sont aussi attachants que cette viennoiserie dont je suis accro depuis des années (mon royaume pour des Kanelbullar, et là on peut parler de corruption!). Frasse les fait évoluer ensemble, interagir, afin que nous les cernions et les acceptions comme “compagnons d’enquête”. J’avoue que parfois, cela frise la caricature, mais la sauce prend quand même! Le rythme est lent, l’auteur prend son temps, avec un flegme et une distance qui frise un english man in Stockholm. A aucun moment, on ne s’ennuie, tout est analysé avec une précision chirurgicale (ça tombe bien!) et interprété. Malgré le ton qui se veut détaché, l’on ressent une certaine oppression, quant à l’orientation que prend l’enquête, et la quête du résultat. 

Comme à la fin de tout bon roman dans lequel on s’est immergé, je referme celui-ci en me demandant ce que je vais bien pouvoir faire de ma vie (à part manger des Kanelbullar et me plaindre de ma prise de poids). Plus sérieusement, cette enquête laisse une trace indélébile dans mon esprit de lectrice compulsive, car malgré mon affection profonde pour la Suède, je n’avais pas encore « vécu » une telle immersion dans le cadre d’un roman scandinave, particulièrement en vogue depuis quelques temps.

J’espère que Frasse me pardonnera les gros clichés volontairement glissés dans cet article, car j’ai réellement apprécié chaque moment de lecture de ce roman, et je le recommande sans aucune modération (contrairement au Kanelbullar, vous l’aurez compris).

Minarii Le Fichant

Frasse Mikardsson, Autopsie pastorale, Editions de l’aube, janvier 2021, 336 pages, 19,80 eur

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