Gérard Guégan, Le Chant des livres

Gérard Guégan est un éditeur, journaliste, critique cinéma, écrivain, journaliste, scénariste, auteur d’une œuvre importante, sous son nom ou sous divers pseudonymes. C’est un des grands noms de l’édition en France. Non pas qu’il ai fait fortune en publiant des coups, mais il a su construire des catalogues exemplaires. On lui doit notamment les éditions Champ libre et le renouveau du surréaliste Sagitaire. Et comme il y a le Chant des Partisans, qui n’est pas sans lui déplaire, il entonne Le Chant des livres, parcours de vie à travers les livres et les rencontres littéraires.

une vie communiste

Né en 1940 dans un milieu populaire dont le livre est absent, dans un Marseille encore enchanté par Pagnol, Gérard Guégan découvre à la fois la littérature et la politique par son oncle et par le Parti communiste. Les deux sont très liés, au point que l’oncle interviendra au sommet de la cellule locale pour éviter un renvoi de l’école. Cette découverte du communisme est lucide. À la fois l’enthousiasme pour la fraternité et les idées généreuses, mais aussi le sectarisme de certains. C’est dans l’idéologie communiste qu’il fera ses premières armes, comme journaliste local à La Marseillaise, puis à Paris dans les pages de L’Humanité. Il apprend son métier, rencontre beaucoup d’écrivains et est lancé dans le monde. Il finira par rompre avec l’idéologie sclérosée du Parti tout en restant foncièrement attaché à ce qu’il avait d’humaniste.

Sa carrière se poursuivra dans l’édition, le cinéma, la télévision, comme auteur et adapter. Mais aussi comme traducteur de Charles Bukowski. Guégan parle peut de son œuvre littéraire, et peu de ses activités continues comme chroniqueur (dans Le Canard enchaîné ou Sud Ouest). Sa vie de passeur restera d’abord marquée par la littérature.

Une vie littéraire

A plusieurs reprises dans ma jeunesse, j’ai fait l’objet d’un procès en sorcellerie. C’était, je ne peux que l’imaginer, la conséquence de mon indiscipline et, partant, de mon goût pour les livres interdits et les écrivains mal-pensants.

Il découvrira la littérature par son oncle plus que par ses professeurs, et par les avisés conseils d’un bouquiniste, qui lui fait découvrir la littérature anarchiste et les grands auteurs qui vont le suivre toute sa vie, dont Stendhal, Dumas et Rimbaud. Plus tard s’ajoutera Armand Robin. Mais c’est surtout par rencontre avec Jean Giono, dans le cadre d’un déplacement scolaire à Manosque. Giono avec lequel il finira par fumer et parler plus librement que ne l’avait prévu le professeur. Ainsi couvre un fabuleux chemin de rencontres parmi lesquelles Jean Paulhan, Louis Nucéra, Pierre Boutang, Philippe Sollers, Henry Miller… excusez du peu ! Les anecdotes qui composent ces pages sont des moments d’humanité simple et partagée. Une période où les auteurs se lisaient entre eux, où les éditeurs s’estimaient et se lisaient, les amitiés étaient solidement construites pour la durée. Le joli mot de camarade avant alors tout son sens.

Le Chant des livres est un petit livre qui relate très rapidement la vie d’un homme, issu d’un milieu modeste et qui s’est consacré à la littérature. Si la partie consacrée aux premières années, celles de formation, est plus intéressante, l’ensemble est aussi le portrait d’une époque révolue sur laquelle plane un joli petit parfum de nostalgie.

Loïc Di Stefano

Gérard Guégan, Le Chant des livres, Grasset, mai 2024, 135 pages, 16 euros

Lire les premières pages.

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