L’invention du colonialisme vert, une utopie occidentale

Un historien de l’environnement

Maître de conférences à l’université de Rennes 2, Guillaume Blanc est un spécialiste de l’Afrique contemporaine qui s’est peu à peu intéressé à un sujet méconnu en Europe : les politiques de préservation de l’environnement menées en Afrique, pays des grands parcs et des espèces menacées, comme la girafe par exemple. Avec L’Invention du colonialisme vert il va prendre à rebrousse-poil pas mal de gens et certainement secouer pas mal d’idées reçues…  

Une idée coloniale ?

Dès le début du livre, Guillaume Blanc explique que l’idée de préservation de l’environnement en Afrique naît avec l’expansion du colonialisme européen. À l’origine on trouve l’idée très répandue en Europe que l’Afrique est un Éden, ou du moins ce qui se rapproche le plus de son imagerie biblique. Les paysages, les animaux sauvages ont conquis l’imaginaire des colons européens. Ceux-ci jugent cependant que les natifs, les indigènes quoi, détruisent par bêtise et par ignorance (voire…) leur environnement naturel. Les européens créent donc, au début pour eux-mêmes, les premiers grands parcs nationaux, à destination du tourisme occidental.

Quant aux populations présentes sur les surfaces de ces parcs, elles n’auront qu’à… Déguerpir, même si elles y sont présentes depuis des centaines d’années. L’idée est de retrouver une nature pure, sans hommes (noirs). Pour autant, les safaris y seront autorisés.

Une réalité

L’auteur prend comme exemple l’Éthiopie qui ne fut jamais une colonie européenne mais dont les parcs nationaux se peuplèrent d’experts et d’administrateurs européens, en manque d’emplois après la décolonisation des années 60. Or tous ces « experts », mandatés par l’ONU ou l’UNESCO, appliquent une politique de protection de la nature qui est effectivement illusoire : comment recréer un écosystème où l’homme, qui en vient, est absent ? Sans compter la chasse que ces « grands blancs » veulent se réserver (Hailé Sélassié combat ainsi leurs prétentions). Et puis le réchauffement climatique et l’érosion des sols sont des réalités qui impactent le paysan africain en général et éthiopien en particulier. Pour autant, le braconnage existe, à destination de clients étrangers (occidentaux et chinois) et des espèces sont en voie de disparition…

Voici en tout cas un ouvrage qui remue.  

Sylvain Bonnet

Guillaume Blanc, L’Invention du colonialisme vert, préface de François-Xavier Fauvelle, Flammarion, septembre 2020, 326 pages, 21,90 eur

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