L’Amérique du Nord de Bluefish à Sitting Bull, l’histoire tragique des amérindiens
Un historien touche-à-tout
Ancien membre de l’école française de Rome, Jean-Michel Sallmann est surtout connu pour ses travaux sur les phénomènes de sorcellerie à l’époque moderne. Il a ainsi publié Les sorcières : fiancées de Satan (Gallimard, 1989). Il s’est aussi intéressé à d’autres sujets comme Charles Quint à qui il a consacré une biographie chez Payot en 2000 et maintenant aux indiens d’Amérique du Nord, d’abord avec Indiens et conquistadores en Amérique du Nord (Payot, 2016) et maintenant avec cette somme qui vient de paraître chez Belin dans la collection Mondes anciens dirigé par Joël Cornette : L’Amérique du Nord de Bluefish à Sitting Bull.
Une présence ancienne
Avec les premières pages, on découvre si on ne le savait pas avant que l’archéologie permette de reculer de plus en plus l’arrivée de l’homme en Amérique. On pensait autrefois que le passage d’Asie en Amérique via le pont de glace sur le détroit de Béring s’était opéré 12 000 ou 15 000 avant notre ère. Désormais les dernières recherches placent le curseur vers -25 000 ans, il reculera peut-être encore. Idem pour les populations. L’apport mélanésien, des îles du Pacifique vers l’Amérique du Sud est désormais certain.
Des tribus face aux Européens
Le Nord du continent subit le choc microbien de l’arrivée des européens, avec notamment la variole et la grippe. La zone ne commence cependant à être colonisée que plus tardivement. Au sud, les Espagnols basés au Mexique lancent des expéditions mais ne trouvent pas d’or, ce qui limite de facto leurs entreprises de colonisation. Les Anglais fondent leurs premières colonies sur la façade atlantique en refoulant les tribus, après des contacts initiaux plus chaleureux. Quant aux Français au Canada, leur faible nombre les pousse au compromis et à nombre de mariages avec des Indiennes. De fait, la présence française fut la moins néfaste aux indiens. Point positif : l’introduction du cheval, rapidement domestiqué par les Indiens.
Un massacre continu
En lisant cet ouvrage, on est en droit de parler dans certains cas de génocide. En Californie, les autorités états-uniennes encouragèrent les miliciens à massacrer les tribus. La pression démographique des immigrants amène des guerres incessantes, à un recul des tribus invités par la force à migrer vers l’Ouest. Ce sera ensuite le système des traités, toujours inégaux, et des réserves dans lesquels des tribus viennent littéralement s’échouer. La dernière moitié de l’ouvrage de Jean-Michel Sallmann est un requiem pour ces hommes et ces femmes réduits en servitude par les gouvernements de Washington et, dans une moindre mesure, d’Ottawa.
L’Amérique du Nord de Bluefish à Sitting Bull est un très bel ouvrage, servi par une iconographie remarquable.
Sylvain Bonnet
Jean-Michel Sallmann, L’Amérique du Nord de Bluefish à Sitting Bull, Belin, novembre 2022, 400 pages, 41 euros