Aux origines, l’archéologie : une science dans le débat public

Un archéologue dans la cité

Ancien élève de l’école normale supérieure, Jean-Paul Demoule est un archéologue qui a beaucoup travaillé sur l’âge néolithique et le passage progressif d’une société de nomades à une société agricole : il en a fait le sujet d’ouvrages comme Les Origines de la culture : la révolution néolithique (éditions le pommier, 2008) ou Les Dix millénaires oubliés qui ont fait l’histoire : quand on inventa l’agriculture, la guerre et les chefs (Fayard, 2017). Il a aussi reçu le prix Roger-Caillois de l’essai en 2015 pour Mais où sont passés les indo-européens ? Le mythe d’origine de l’Occident (Seuil, 2014), ouvrage très controversé où il mettait en question l’idée même des fameux indo-européens, parfois récupéré par des mouvements d’extrême-droite.

Un ouvrage polémique

Aux origines, l’archéologie, paru chez La découverte en début d’année, compile des articles parus principalement sur le blog de l’auteur, réagissant à l’actualité lorsque celle-ci « percute » histoire et archéologie. On le voit ainsi réagir sur la controverse autour de la localisation du site d’Alésia, relancé par l’inénarrable Franck Ferrand, et de la sempiternelle question des ancêtres gaulois.

Les débats sur l’identité ont ramené les peuples de la Gaule sur le devant de la scène, prêt à être utilisés par certains idéologues. Demoule se montre parfois lui-même un idéologue de gauche : en témoigne les pages qu’il consacre au Puy du fou et au rachat de la « bague » de Jeanne d’Arc (je doute personnellement que cette bague ait réellement appartenu à ce personnage) par Philippe de Villiers. Ce sera apprécié par certains et moins par d’autres.

Et une cause à défendre

Autre thème central de l’ouvrage : la question de l’archéologie préventive/ Rappelons qu’une loi fut votée et a amené à la création de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), devant systématiser les fouilles archéologiques lors de grands chantiers, voire à la préservation de certains sites.

Or, Demoule montre bien que l’appel à des sociétés privées, bien dans l’air du temps néolibéral, pour mener à bien ces fouilles préventives est souvent couteux et inefficace. Pire, il montre avec raison l’indifférence des politiques (pas tous) à ces sujets et l’absence de réels débats. Ici il s’agit de la préservation du patrimoine archéologique, gravement menacé par les intérêts économiques. Espérons qu’il y aura du changement !

Sylvain Bonnet

Jean-Paul Demoule, Aux origines, l’archéologie, La découverte, janvier 2020, 240 pages, 19,90 eur

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