La chute d’un empire de Gonzague Espinosa-Dassonneville, la route vers l’indépendance de l’Amérique latine

Ce livre de Gonzague Espinosa-Dassonneville vient combler un certain vide de l’historiographie française concernant les indépendances des pays d’Amérique du Sud vis-à-vis de leur métropole espagnole. Et c’est tant mieux car la France y fut d’ailleurs liée.

Un processus long

En s’appuyant sur une historiographie hispanisante rigoureuse ainsi que sur sa propre connaissance des sources, Gonzague Espinosa-Dassonneville démontre bien que les relations entre la métropole et ses colonies tout au long du XVIIIe siècle sont marquées par des dynamiques contraires. D’un côté le loyalisme envers la Couronne se maintient et de l’autre les colonies américaines prennent de plus en plus conscience de leur singularité, renforcée par les distances. Si Charles III s’avère un roi compétent, réformateur malgré des hésitations, son fils Charles IV n’a pas la même envergure. Dépendante de l’alliance française depuis le pacte de famille, l’Espagne déclare pourtant la guerre à la France Révolutionnaire… Pour peu de temps et choisit en 1795 de renouer avec Paris. De plus en plus satellisée, la monarchie espagnole file sans le savoir vers l’abîme.

Un responsable nommé Napoléon

En envahissant l’Espagne et en détrônant les Bourbons après une crise dynastique entre Charles IV et son fils Ferdinand, Napoléon espère aussi avec l’installation de son frère Joseph à Madrid mettre sous influence les colonies américaines de l’Espagne : peine perdue, toutes se rallie à la junte rebelle installée à Cadix où sont nommés des députés issus des colonies. Les déclarations d’allégeance à Ferdinand VII se multiplient outre-Atlantique, ce qui n’empêche pas les révoltes ou les velléités d’indépendance stimulées par la défaillance de la métropole…

Et Ferdinand VII d’Espagne rata le coche

Prince peu formé, attaché à l’absolutisme, Ferdinand VII, rétabli sur son trône en 1814, révoque les décisions prises pendant la guerre civile par la junte où les cortes. Il envoie de plus des troupes pour rétablir l’ordre dans les colonies : il aggrave la situation et favorise les forces centrifuges incarnées dans des leaders comme Simon Bolivar. Le roi d’Espagne épuise bien des partisans de l’idée monarchique par sa raideur réactionnaire. Au final, l’Espagne perd son empire, pour le plus grand bénéfice de puissances comme l’Angleterre, la France et les États-Unis qui vont imposer leur impérialisme financier. Synthèse passionnante.

Sylvain Bonnet

Gonzague Espinosa-Dassonneville, La chute d’un empire, Passés composés, mars 2023, pages, 23,50 €

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