« Les Massacres de la République romaine »
Guerre et massacre à l’époque romaine
Maître de conférences à l’université de Nantes, Nathalie Barrandon est spécialiste de la vie politique de la République romaine, à qui on doit plusieurs articles parus dans des recueils d’actes de colloques ou des revues universitaires portant sur la guerre à l’époque républicaine. Elle publie chez Fayard un ouvrage qui récapitule ses recherches, Les Massacres de la République Romaine, avec en filigrane une question lancinante et récurrente : le génocide existe-t-il dans l’histoire antique ?
Un voyage dans l’horreur antique
Le moins que l’on puisse dire est que les anciens n’étaient pas des gens pacifiques ! à l’aide des sources littéraires, épigraphiques et archéologiques, Nathalie Barrandon nous dresse un panorama épique et sanglant des guerres victorieuses et sanglantes menées par Rome. Et on peut dire sans problèmes que les romains ont été des conquérants durs, féroces. Que cela soit en Afrique, en Espagne, en Grèce ou en Gaule, on trouve beaucoup d’exemples de massacres (un mot qui n’existe pas en latin, rappelle l’historienne). Le sommet étant atteint à Carthage en 146, où la ville est anéantie et les survivants réduits en esclavage et… en Gaule où César mène une véritable guerre d’extermination contre les Éburons, peuple rétif à sa domination.
Un ouvrage qui échappe à l’anachronisme
Alors le romain fut-il génocidaire ? Pas du tout au sens où on l’entend aujourd’hui, même si Raphael Lemkin, qui a forgé le concept, s’était penché sur l’antiquité pour trouver des précédents au génocide des arméniens où à la Shoah. Pas de racisme déjà chez les romains : si Carthage fut détruite, les cités qu’elle avait fondé ou dominé, comme Utique, s’intégrèrent au monde romain et le punique survécut comme langue très longtemps. Quant à la Gaule, César fit un exemple des Éburons mais par la suite il mit en scène, médiatiquement pourrait-on dire, sa clémence envers d’autres peuples de la Gaule. Par contre, on comprend avec ce livre que la violence de masse faisait partie de la civilisation romaine, y compris en période de guerre civile, qui y trouva aussi une occasion de forger la figure du tyran : il en fut ainsi de Sylla. Une excellente synthèse sur un sujet peu abordé frontalement par l’historiographie.
Sylvain Bonnet
Nathalie Barrandon, Les Massacres de la République romaine, Fayard, 448 avril 2018, pages, 23 euros