Marina de Van, Lettre à ma chatte
Le chat et l’écrivain, voilà un couple traditionnel. Souvent c’est un éloge du chat, sa grâce et son indépendance, qui guide l’auteur. Mais rarement avec autant d’intensité que Marina de Van dans sa Lettre à ma chatte, on pourra lire un déclaration d’amour, qui est aussi un lourd travail introspectif, à sa compagne féline.

« Dans ma maladresse avec autrui, j’ai longtemps cru que le problème venait des autres. »
Marina de Van raconte comment elle a vécu à côté de chats, depuis sa petite enfance. Ceux de son père, exclusifs, le sien, comme une simple compagnie de tendresse mais dont la disparition ne touchera pour ainsi dire pas. En plagiant le titre d’un roman d’Elizabeth von Armin, on serait presque sur « Tous les chats de ma vie ». Sauf qu’aucun n’aura vraiment compté, c’est-à-dire bouleversé l’autrice au point d’en être profondément changée. C’est le pouvoir du grand amour, entier, qu’il s’agisse d’un compagnon humain ou félin, la puissance du sentiment est la même.
Mais aussi comment elle a, pour ainsi dire, vécu à côté d’elle-même. Il faudra la révélation de XXX pour comprendre tout ce temps passé à n’être pas soi, ni être totalement à soi ou aux autres. Des animaux, des gens, de soi, elle n’avait pour ainsi dire pque faire, parce que rien ne lui parlait vraiment, rien n’éveillait en elle cette urgence de la nécessité.
« Tu as été l’aboutissement de plus de quarante années de soif d’amour. »
Il faudra attendre l’arrivée de la chatte tant aimée, voire adulée, pour que la vie de Marina de Van trouve son sens. Avant, il y avait comme un mal-être permanent, une absence à soi-même. Après, il y aura la nécessité d’être présente, constamment, dans l’immédiateté de cette reine féline. Cette relation d’amour pur et nécessaire est la marque de ce beau roman introspectif.
La préface de Pascal Bonitzer est intéressante, en ce qu’elle permet de découvrir la personnalité de Marina de Van et son implication dans ses films. Mais on regrettera qu’elle ne soit pas une postface, car elle dit beaucoup, beaucoup trop, sur le récit lui-même, comme une pré-analyse qui divulgue un peu, sans gâcher pour autant, ce récit intense.
Loïc Di Stefano
Marina de Van, Lettre à ma chatte, préface de Pascal Bonitzer, Abstractions, octobre 2024, 94 pages, 12,99 euros