Michel Poniatowski, l’homme de Giscard

Haut-fonctionnaire, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, Maxime Tandonnet a aussi écrit des livres d’histoire, dont une biographie très réussie d’André Tardieu (Perrin, 2019). Malheureusement décédé en 2024, il avait juste eu le temps d’achever une biographie d’un personnage très caricaturé de son vivant, Michel Poniatowski, aujourd’hui publié chez Perrin avec une préface émouvante d’Arnaud Teyssier.

Aristocrate, résistant et politique

Michel Poniatowski est issu d’une ancienne famille noble polonaise (mais aussi d’origine italienne) dont est sorti un roi, Stanislas Poniatowski, ancien amant de Catherine II, impuissant devant le dépeçage de son royaume par la Prusse, la Russie et l’Autriche. La famille a fini par s’établir en France et le futur ami de Giscard se trouve aussi descendre de Morny et Talleyrand (auquel il consacrera de nombreux ouvrages) : quels ancêtres ! le jeune Michel, prince de son état, s’illustre en tout cas dans la Résistance, fait peu connu, et fait une belle guerre. Il entre ensuite à l’ENA, fait des passages dans l’administration et des cabinets ministériels, dont celui de Pierre Pflimlin. « Ponia » ne soutient de Gaulle que du bout des lèvres, préfère s’engager chez les Indépendants et fait une rencontre capitale, celle de Giscard. Entre les deux hommes, c’est le coup de foudre amical, le prince s’engage alors dans un soutien inconditionnel envers celui qu’il voit un jour accéder à l’Elysée. Elu député en 1967, Poniatowski se fait remarquer par sa verve. L’homme n’est pas un orateur mais se montre habile bretteur. Il finit par être nommé ministre de la santé par Pompidou, préparant un projet de loi de légalisation de l’avortement repris par Simone Veil. Lorsque Pompidou meurt en 1974, VGE se présente et le prince est derrière lui, négociant avec Chirac le soutien d’une partie des députés UDR (le fameux « appel des 43 »). Giscard gagne. Et Poniatowski aussi.

Apogée et chute

Le chemin vers la roche tarpéienne n’est jamais loin pour un homme politique… Poniatowski devient ministre de l’intérieur, s’illustre dans la lutte contre la criminalité mais fait plusieurs faux pas. Il donne l’impression de s’immiscer dans le fonctionnement de la justice, parle un peu à tort et à travers. Il ne rate jamais une occasion d’attaquer le PCF ou de critiquer la gauche. Il est aussi l’un des premiers à voir l’antagonisme monter entre Chirac et Giscard, suspectant le premier de préparer l’élection de 1981. De fait, le prince a raison. De sa démission spectaculaire en août 1976 à son élection à la mairie de Paris en 1977, Chirac s’affirme, ferraillant contre un président qui l’ignore (ce qui énerve encore plus le président du RPR). En 1977, Poniatowski est contraint de démissionner par Giscard : leur relation perdurera mais ne s’en remettra jamais. S’il est recasé au Parlement européen, Poniatowski se réfugie dans la posture de Cassandre, prédisant les problèmes et les échecs. La victoire de la gauche, favorisée par Chirac, le plonge dans le pessimisme et il multiplie les pamphlets contre les socialistes dans les années 80 et 90. Européen dans les années 70, Poniatowski bascule dans l’euroscepticisme et vote contre Maastricht avec Séguin et Pasqua (son ennemi vingt ans plus tôt !). Il écrit aussi sur les nouvelles technologies des ouvrages visionnaires que peu lisent. Et donne des avertissements contre la montée de l’immigration. Cassandre toujours… Il meurt en 2002, presque oublié.

Très bonne biographie sur un personnage au fond passionnant.

Sylvain Bonnet

Maxime Tandonnet, Michel Poniatowski : un prince dans la République, préface d’Arnaud Teyssier, Perrin, mars 2025, 352 pages, 24 euros

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