Mon autre famille, les mémoires d’Armistead Maupin

Auteur des incontournables Chroniques de San Francisco, Armistead Maupin a publié ses mémoires, Mon autre famille, qu’on lit avec beaucoup de plaisir et comme une chronique — encore —, celle de sa vie, des Etats-Unis et de son temps.

En une vingtaine de courts chapitres, Maupin file à toute allure et en brossant un large panorama sur ce qu’a été son histoire. Issu d’une famille très conservatrice, Maupin a une vie coupée littéralement en deux, avant et après le Vietnam. La première moitié de Mon autre famille s’intéresse à sa jeunesse à Raleigh, en Caroline du Nord. La seconde est un autre monde, sa vie d’écrivain célèbres à San Francisco. Et si la première est sa famille de sang, la seconde est sa famille de coeur, sa « logical Family » comme le titre original de ses mémoires. Passage de l’une à l’autre vie, le métier de journaliste qui le conduira aux bureaux de San Francisco de l’Associated Press, et, pour ainsi dire, à sa vraie vie d’homme.

Deux mondes opposés, mais c’est le premier qui forme et qui détermine le second. Car les parents, omniprésents dans la première moitié sont loin d’être absents de la seconde, comme si la liberté absolue (la ville phare de l’esprit des années soixante-dix, la célébrité, l’argent) ne parvenait pas à occulter l’enfance, ni à se libérer tout à fait, notamment au regard de son homosexualité heureuse mais qui paraît comme jugée par une éducation rigoriste. L’affirmation de son homosexualité revient presque dans les mêmes termes que dans les Chroniques de San Francisco, événement fondateur de sa vie d’homme.

Malgré cela, Mon autre famille reste d’un ton général léger et vivant, avec beaucoup d’humour et un vrai beau regard sur une vie riche en rencontres (Rock Hudson, Harvey Milk) et en combat (notamment pour la liberté homosexuelle). Une vie qui va du presque dénuement total à la célébrité littéraire et la liberté financière, en passant par nombre de petits boulots. Et, petit plaisir supplémentaire, Maupin révèle quelques secrets de fabrication de ses Chroniques de San Francisco, qui reste le point d’entrée principale de son œuvre.

Loïc Di Stefano

Armistead Maupin, Mon autre famille, traduit de l’anglais (USA) par Marc Amfreville, Points, mai 2019, 380 pages, 7,80 eur

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