Néron, un bon petit diable !

Rome, encore et toujours


Agrégée, Catherine Salles a enseigné le latine et la civilisation latine (drôle de nom !) à l’université de Paris X-Nanterre. Les amateurs d’histoire romaine ont certainement lu son ouvrage sur la Rome des Flaviens (Perrin, 2008), son Lire à Rome (Les belles lettres, 2008) ou encore Le Grand incendie de Rome 64 apr. J.C. (Tallandier, 2014) et enfin Les Bas-fonds de l’antiquité (Payot, 2016). On lui doit également une biographie assez réussie de Tibère (Robert Laffont, 1985) qui mériterait d’être rééditée, tant elle éclaire en partie le parcours de Néron, auquel elle consacre une biographie.

Né dans la pourpre et le sang

Le futur Néron naît en 37 de notre ère, fils d’une descendante de Germanicus, Agrippine la jeune. En 37, Caligula, fils de Germanicus, règne depuis la mort de son grand-oncle Tibère. Vraisemblablement fou, Caligula terrorise Rome et sa famille, une famille qui ne compte plus les complots, les meurtres et les assassinats.

On ne peut pas dire que le jeune Néron grandit dans une atmosphère familiale sereine, même après l’assassinat de Caligula et l’accession de Claude au pouvoir. Sa mère nourrit de grandes ambitions pour lui parce qu’elle espère pouvoir régner à travers lui comme le démontre Catherine Salles. Et Agrippine est rusée, avançant patiemment ses pions pour éliminer sa rivale Messaline. Puis elle épouse le faible Claude et écarte son fils Britannicus de la succession au profit de Néron. La voie est libre.

Un règne qui a sa logique

Reprenant Eugen Cizek, Catherine Salles montre bien que les débuts du règne sont positifs, au point qu’on parle parfois d’un glorieux « Quinquennium Neronis ». Influencé par Sénèque et Burrus, Néron se montre sage, éclairé, modéré dans son gouvernement. Pour autant, il se perd dans des conflits avec sa mère qui réalise les limites de son influence sur lui (voir d’ailleurs l’excellente biographie que lui a consacré Virginie Girod).

Mais, souvenons-nous en, le jeune empereur a grandi entouré de complots et vit dans leur hantise : il élimine ainsi Britannicus, puis sa mère. Matricide, Néron sombre peu à peu dans la paranoïa et fait exécuter les derniers membres de sa famille. Pour autant, et Catherine Salles aurait pu plus insister là-dessus, sa politique a une logique. Influencé par le modèle hellénistique, voire par l’Egypte, il propose une monarchie proche du peuple, qu’il abreuve de jeux et de célébrations artistiques. Certes en rupture avec le modèle augustéen, il renoue en fait avec la politique de son ancêtre Marc-Antoine dont le sang coule aussi dans ses veines.

Voici en tout cas une biographie synthétique qui permettra au lecteur de se faire une idée de ce règne violent, paradoxal et souvent caricaturé.

Sylvain Bonnet


Catherine Salles, Néron, Perrin, juin 2019, 288 pages, 23 eur

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