Napoléon à Sainte-Hélène, le dernier combat

Une nouvelle approche

Auteur d’une synthèse sur la maison de l’empereur (Fayard, 2011) et d’une remarquable biographie de Joséphine, le paradoxe du cygne (Perrin, 2015) et de La Saga des Bonaparte (Perrin, 2018), Pierre Branda s’attaque ici à une partie de l’histoire de Napoléon déjà très balisée par les historiens : la captivité à Sainte-Hélène. Récemment, Charles-Éloi Vial y a par exemple consacré un livre assez remarquable. L’originalité est ici de proposer, comme l’explique l’auteur dans le prologue, une histoire de la captivité qui ne se résume pas à l’affrontement avec le gouverneur de l’île, le célèbre Hudson Lowe, aux avanies qu’il inflige à ses compagnons où à tout ce qu’a pu dicter Napoléon.

Il étend aussi le périmètre de son récit à l’Angleterre, où Napoléon passionne l’opinion publique et a des admirateurs. Enfin, il insiste pour redonner à cette histoire tous ses possibles, rien n’était en effet joué d’avance. Et tout est dans cette histoire sort de l’ordinaire, y compris sa déportation, décision très politique des anglais : ils évitent ainsi son débarquement sur leur territoire car sa présence sur le sol britannique aurait pu faire bénéficier Napoléon de certains droits, comme l’habeas corpus.  

Un prisonnier très pugnace

L’amateur connait déjà les grandes lignes de son affrontement avec son geôlier, par ailleurs bien analysé par Pierre Branda. Une des originalités du livre est d’insister sur la combativité du personnage et sur l’importance des contacts entretenus avec l’extérieur. Napoléon reçoit la presse anglaise et française avec retard, à cause de la lenteur des communications. Mais il réussit avec une facilité déconcertante à faire publier un pamphlet comme Les Lettres du Cap, écrit pour défendre sa cause, qui est publiée en Angleterre. Son objectif est simple : toucher l’opinion publique anglaise pour faire pression sur le gouvernement anglais. Le Mémorial de Las Cases fut ainsi conçu originellement dans ce but.

Brillant communicant, Napoléon sait qu’il a aussi des admirateurs anglais comme Lord Holland et bénéficie de la sympathie du parti Libéral (« whig »). Il espère qu’un changement de gouvernement change ses conditions de détention, voire amène à son transfert en Angleterre. Pierre Branda démontre qu’il a entretenu cet espoir au moins jusqu’en 1818 : le congrès d’Aix-La Chapelle douche en effet ces espoirs qui étaient cependant loin d’être chimériques. Pour autant, malgré des baisses de moral, puis la maladie (qu’aucun médecin ne réussit à diagnostiquer correctement), Napoléon ne renonça pas.  

Napoléon à Sainte-Hélène est un ouvrage brillant qui renouvelle bien des perspectives. Recommandé.  

Sylvain Bonnet

Pierre Branda, Napoléon à Sainte-Hélène, Perrin, janvier 2021, 480 pages, 27 eur

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