Roulette Russe, dernier tour de piste
Le retour du Condor
Voici un recueil d’histoires composés par James Grady autour du personnage qu’il a créé dans les années soixante-dix, le Condor, interprété par Robert Redford dans le superbe film de Sydney Pollack, Les trois jours du Condor. Grady pensait avoir créé ce personnage pour un seul roman mais le Condor l’a hanté. Il lui est apparu, comme il l’explique dans la préface, comme fait pour l’époque actuelle. Après l’avoir enfermé dans un asile dans Mad Dogs, il en fait l’espion ultime avec Les derniers jours du Condor. Roulette Russe est une dernière variation autour d’un personnage qui aura toujours pour nous les traits de Robert Redford.
Six balles lentes
La radio cracha le riff d’ouverture à la batterie de « Mystery Achievement », le tube de Chrissie Hynde et des Pretenders qui avait traversé le brouillard cocaïné des missions de Vin dans les années 70 et 80.
Vin esquiva un coup de vaporisateur.
Roulette Russe comprend six chapitres, six flashs sur la vie du Condor et aussi sur les turbulences de notre monde. Le premier, très significatif, voit le condor menacé avec sa compagne Merle dans son intimité, attaqués par Justin, un homme qui avait réussi à gagner leur confiance. Ils s’en sortent de peu, grâce aux réflexes du Condor Visiblement les Russes sont responsables. On voit ensuite le Condor recruter un agent spécial du FBI pour le compte de son agence, la V, pour contrer les Russes qui se préparent à influencer la campagne électorale de 2016. Condor est très actif, même si sa compagne, à un moment, se dressera contre lui, peut-être pour l’aider.
Un recueil nostalgique et actuel
Notre (je trahis ici une certaine affection) Condor séduit le critique sévère (trop peut-être). Il n’empêche que Grady, bien informé, tombe juste. Et son personnage sonne juste, y compris dans ses démêlés sentimentaux avec sa compagne Merle : Grady est ici sur la même ligne que le scénariste David Rayfiel qui travailla sur l’adaptation cinéma de Pollack : pas d’effusions mais de l’oblique et du fort, pas la peine de faire pleurer dans les chaumières. Et puis les turpitudes de la Russie, comment dire… Ce roman surfe sur une actualité lourde (ce qui n’exclut pas américains de bien des turpitudes).
Roulette russe est un bon roman d’espionnage.
Sylvain Bonnet
James Grady, Roulette russe, traduit de l’anglais par Hubert Tézenas, Rivages, octobre 2022, 240 pages, 18 euros