Un printemps sans le peuple, la Tunisie en question

Analyser la Tunisie contemporaine

Auteur d’ouvrages comme Athènes vu par ses métèques (Tallandier, 2011) ou La France est à refaire (Passés composés, 2020), d’origine tunisienne, Saber Mansouri a signé l’année dernière un essai sur l’évolution de la Tunisie depuis la révolution du Jasmin. Signalons que la Tunisie a vu, depuis la parution de son essai, son président durcir la répression.

Un pays sans son peuple ?

Lire l’ouvrage de Saber Mansouri est proprement effrayant. On découvre ici la peinture d’une société où le peuple est constamment oublié. Oublié des Beys au XIXe siècle, oublié par le colonisateur français (qui a pris le contrôle de la Tunisie en se servant de la dette de l’état comme levier), oublié des gouvernements de Bourguiba (pourtant émancipateur des femmes) et de Ben Ali depuis l’indépendance. Saber Mansouri dépeint un pays ou le pouvoir s’exerce pour le peuple mais sans lui, un travers qui s’est accentué depuis 2011. Conclusion : l’autoritarisme et la démocratie, imposés par les mêmes élites, n’aident pas le peuple tunisien, traité en éternel mineur et frappé par une crise économique qui n’en finit pas…

Et maintenant ?

Ce livre se révèle passionnant pour tout amateur d’histoire du Maghreb contemporain, souvent envisagé de ce côté-ci de la Méditerranée que sous l’angle de l’immigration.  À la lecture, on comprend vite que l’auteur n’est reliable à aucun parti tunisien, n’a aucune complaisance envers l’islamisme politique. On note cependant à la fin de l’ouvrage une certaine indulgence envers le président actuel, qui a opéré, on l’a dit, un récent tour de vis qui n’a rien à voir avec la pratique démocratique. Sur quoi cela débouchera-t-il ? Un régime autoritaire ? Ou est-ce une simple transition ? L’avenir le dira.

Cet essai vaut le coup d’être lu pour une simple raison : réfléchir.

Sylvain Bonnet

Saber Mansouri, Un printemps sans le peuple, Passés composés, août 2022, 224 pages, 20 euros

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