Winter is coming, les racines médiévales de Game of Thrones

Carolyne Larrington enseigne la littérature anglaise médiévale au St John’s College, à Oxford. Elle est spécialiste de la tradition arthurienne et des sagas nordiques. Elle s’intéresse dans Winter is coming aux racines médiévales de Game of Thrones, la série cultissime. Alors que de nombreuses parutions (livres et magazines) tentent de comprendre le monde de George R. R. Martin quand celui-ci avance gravement vers sa fin, Carolyne Larrington se pose une question différente : d’où vient Westeros ?

un parcours géographique et historique

Au-delà des sources d’inspirations qu’on a pu évoquer, Carolyne Larrington fait une étude comparée entre le monde de Westeros et le nôtre, et y puise de très belles propositions d’analyse. Jamais péremptoire, elle aligne une telle quantité d’éléments qui vont dans le sens d’une lecture inspiré de l’œuvre. Julien Gracq, géographe de formation, prétendait que « l’histoire, c’est de la géographie dans le temps, et la géographie de l’histoire dans l’espace », et c’est avec cette double approche que Carolyne Larrington nous fait entrer dans les méandres des nombreuses sources potentielles qui ont inspiré Martin.

L’Europe médiévale ainsi que l’empire Mongol (qui forme le coeur d’inspiration des Dothrakis) est d’abord considérée comme essentiellement peuplée d’analphabètes, aussi le poids de la parole et des images est-il essentiel pour comprendre le monde. Et c’est sur ces deux éléments que Martin crée le sien : chaque famille a son blason et sa devise, même si, par exemple, les Lannisters sont plus connus pour « un Lannisters paie toujours ses dettes » que pour « Je rugis ». Sur cette base, Carolyne Larrington explore tout le système féodal qui structure l’ensemble de la saga.

Carolyne Larrington commence son étude par le Nord, puis la cité royale, puis les provinces alentour, les cités libres, les Immaculés, Valerya et l’inaccessible orient lointain de Qarth. Elle termine son parcours par les contrées éloignées, les cités libres et les immenses plaines. Quant aux Marcheurs blancs, aux dragons, aux géants et autres créatures merveilleuses, chacun trouve son origine potentielle dans des légendes et folklores médiévaux.

un livre d’historien

Appuyé sur une impressionnante culture et une capacité de mobilisation des références issues aussi bien de l’univers arthurien que des sagas islandaises ou la folle épopée de Gengis Khan, Winter is coming est une source de réflexions et d’inspirations pour tous les fans de la série. Qu’il s’agisse des monstres d’au-delà du mur, légendaires pour les uns mais bien réels pour les autres. Que ce soit les cultures et les religions (les anciennes et les nouvelles). Que ce soit les mœurs, la politique, les relations économiques entre les cités, rien ne lui échappe.

Mais Winter is coming est surtout la preuve que George R. R. Martin a écrit une œuvre inscrite dans le temps, et qui nous parle essentiellement de nous-mêmes.

Loïc Di Stefano

Carolyne Larrington, Winter is coming, Passés Composés, avril 2019, 288 pages, 24 eur

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